Humanitaire
Tunisie: le difficile accès aux soins des migrants subsahariens
Repoussés vers la Libye, ils sont confrontés à d’énormes risques sanitaires.
La crise migratoire que connaît la Tunisie prend de l’ampleur. Depuis le début juillet 2023, la ville de Sfax (centre-est du pays) connaît des tensions entre les migrants subsahariens et les habitants. Entre 500 et 700 personnes sont arbitrairement chassées, presque toutes expulsées vers une zone désertique inhospitalière à la frontière libyenne.
Ces expulsions collectives font suite à des affrontements ayant conduit à la mort d’un jeune Tunisien, le 3 juillet.
« Aidez-nous! Sinon, on va mourir »
Sfax est devenue le principal point de départ de l’immigration irrégulière vers l’Europe. D’où la présence importante de réfugiés dans cette ville. Plusieurs groupes de personnes expulsées ont été parquées dans des sites gardés par des force de sécurité, comme à Médenine ou à Ben Guerdane, rapportent les ONG. Mais leurs conditions sanitaires et sécuritaires posent problème.
Pire encore est la situation des quelque 150 à 200 personnes encore coincées dans le désert. Elles manquent de soins. « Aidez-nous, sinon on va mourir, y a rien ici, y a pas à manger, y a pas d’eau », témoigne l’une d’elle à l’AFP. Mais pourquoi conduire ces migrants vers le désert libyen compte tenu de l’enfer dans lequel se trouve déjà ce pays?
Soutien des ONG
La Libye, hautement fragilisée par une guerre civile de dix ans peine, en effet, à retrouver sa stabilité. Là-bas aussi, le droit à la santé des migrants est bafoué. Coincés au milieu des zones de conflits, ces réfugiés sont doublement sanctionnés. Ils souffrent souffrent quotidiennement d’un manque de prise en charge sanitaire. Ils sont exposés à tous les risques de santé, alertent les différentes ONG présentes dans le pays.
La Libye accueillait avant la crise plus de 2,5 millions de travailleurs originaires des pays voisins, d’Afrique subsaharienne et d’Asie. Un grand nombre d’entre eux tentent aujourd’hui de fuir le pays.
Des institutions internationales et des ONG ont renforcé leurs capacités d’assistance médicale et de soutien psychosocial. Parmi elles, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a contribué à la mise en place de plusieurs unités hospitalières. Evitant ainsi à ces derniers d’être livrés à eux-mêmes.
« Abusés, battus, torturés »
Outre les camps pour réfugiés, nombre de migrants se trouvent dans les centres de détention contrôlés par les autorités libyennes. Ils sont exposés à des risques de maladies et à un manque de prise en charge urgente pour certains cas, indique un récent rapport de Médecins sans frontières (MSF).
« Entre 5 000 et 6 000 personnes sont détenues dans les centres de détention officiels, mais il est impossible de savoir combien sont retenus dans d’autres lieux de captivité, des prisons clandestines directement sous le contrôle de trafiquants et d’acteurs criminels privés », souligne ce rapport. Il pointe aussi des cas de « migrants abusés, battus, torturés, ou emprisonnés dans des conditions inhumaines, sans accès aux soins de santé ».
Bien que les ONG aient renforcé leur présence, les risques sanitaires et les abus n’ont fait qu’augmenter, alerte l’agence des Nations unies pour les réfugiés.